jeudi 14 juillet 2011

DSK versus ND, éclairage d'ambiance. L'histoire écrite en France et aux USA, ô stupeur, n'est pas la même.

13/07/2011 à 10h35 - mis à jour le 14/07/2011 à 15h08    liens

LE PLUS IMPORTANT DANS LE DISCOURS, C'EST CE QU'IL NE DIT PAS

Des articles comportant des éléments qui changent tout, du "NY Times" par exemple, (équivalent du "Monde", à ne pas confondre avec le "NY Post", équivalent, lui, de "France-Samedi") ne passent pas en France ou à peine, un survol de quelques mots qui glisse comme neige au soleil.. ainsi que le signale "Superno". Exemples (d'après son blog):

"Il est rapidement apparu que deux autres employées de l’hôtel ont déclaré aux autorités que la veille au soir M. Strauss-Kahn les avait invitées, séparément, à visiter sa suite. Elles ont séparément décliné." En France, seul le Figaro en a fait 2 lignes au départ mais personne n’a parlé de "coup de théâtre" ni de "retournement", contrairement à ce qui s’est passé ensuite lorsque la victime présumée a été transformée en coupable. Même si ça ne prouve pas le viol, on ne peut qu'en déduire que DSK avait un besoin urgent de [...] et qu’après s'être pris deux râteaux coup sur coup, il avait décidé de passer à l'acte plus hard.. sur une LIP (little important person... encore plus "little" que les deux autres) supputant que celle-là, noire, en position précaire, serait plus docile (ou se tairait.)

Et encore : "une caméra vidéo l’a montré qui prenait un ascenseur vers 1h20 du matin avec une femme qui ne faisait pas partie du personnel de l’hôtel. Selon un policier, elle a été logée, mais a refusé d’être interrogée sur sa visite." On croit rêver : elle ne veut pas dire ! Qui est-elle ? Que faisait-elle avec lui ? On sait pas. Même si cela n’a peut-être aucun rapport avec l’affaire, il est stupéfiant qu’elle n’ait pas été interrogée plus avant. Les enquêteurs ont davantage approfondi la personnalité de Nafissatou Diallo et se sont servis de détails bien moins signifiants et reliés à l'affaire pour la qualifier de prostituée. 

D'autre part, les révélations sur ses "mensonges" ont été tronquées et dénaturées : le lendemain de l’agression présumée, elle aurait confié à un ami emprisonné quelque chose comme : "T’inquiète pas, il a plein de fric, je sais ce que je fais", version que son avocat conteste, le traducteur de cette phrase "qui pourrait causer le blanchiment total" de DSK ne parlant pas exactement le même dialecte qu'elle ! Silence sur ce point. Plus important encore : "Kenneth Thompson a noté qu'elle avait aussi parlé de l’agression d’une manière qui ne contredit en rien sa déposition." Or ne se sachant pas écoutée, si elle avait agencé un complot, n'aurait-elle pas triomphé, "ça y est, c’est fait, tout baigne. Combien crois-tu que je peux me faire ?" Sa candeur ici ne colle pas avec le cran d'une femme ayant monté une telle baraque (qui a tout de même fait tourner le monde politique à l'envers et le secoue encore) contre un des gus les plus puissants qui soient. Se faire bêtement piéger par un appel téléphonique.. à un centre de détention, lorsque tout le monde sait que les conversations sont écoutées! ne colle pas avec le personnage supposé de Merteuil qu'on tente de lui attribuer.

Et puis, même si elle a prononcé une phrase approchante, cela ne prouve rien sauf qu’après coup, elle a vu, ou plus vraisemblablement, pour la réconforter, on lui a fait voir et seriné (rappelons que sa culture est assez rude vis à vis des femmes -excision, mariages forcés très jeune etc-) qu’elle tenait là l’occasion d’échapper définitivement à son sort et de surmonter l'exclusion éventuelle de la part des siens. N'importe quel/le féministe, devant une femme désespérée après une histoire aussi énorme (dont il n'y a aucun précédent jusqu'à présent*) est amenée à lui tenir de tels propos. (Laisse filer, tu t'en remettras tout de même et fais le raquer, ça ne compensera jamais mais etc.) Peule, elle court le risque d'être mise au ban de certains de sa communauté, totalement isolée, sa fille idem, et ce pour toute leur vie et même si elle est reconnue victime! Ecoutez les propos "mesurés" ("Allah sait, moi pas !") de l'un de ses demi-frères "américain" (pas les autres): ils sonnent comme un désintéressement désinvolte voire une défiance: dans les grandes fratries d'âges parfois transgénérationnels des familles polygames, la hiérarchie dessine des clans étanches qui ne sont pas toujours solidaires et même parfois franchement ennemis (lien, voir l'avant dernier article). Pour ce "frère", apparemment le plus nanti du groupe, Nafi dans sa détresse semble une encombrante pouvant freiner son ascension et il est clair qu'il ne mouillera pas sa chemise pour elle.

Et surtout, cessons de mythifier dans un sens comme dans l'autre. Un élément psy connu de tous les spécialistes ou des lecteurs de Marie-Chantal : la dépression change les gens et parfois pas pour le meilleur. Combien de femmes aimantes et désintéressées, dans le douleur d'avoir été trompées/larguées ont-elles lancé à un volage, sans en penser un iota : "tu veux batifoler/filer avec ta Julie après x ans de vie commune? OK mais je te préviens, tu vas raquer, je ne te lâcherai pas sans t'avoir plumé." Je l'ai fait. (Menacé, pas exécuté.) La rage dégrade. On s'accroche à ce qui vient à l'esprit (lien) ou à ce qui, suppose-t-on, va faire le plus de mal à qui vous en a fait, Nafi comme tout le monde.. Ni sainte ni garce, elle est comme tous, au milieu, et varie.

Et voilà à partir de quoi on a vissé sur le dos d'une femme une pancarte d'éphémère (lien) type Merteuil, inversant les didascalies et les rôles (lien.)

*Le seul précédent historique qui vienne à l'esprit (tragique), au 4ème siècle avant JC, est Lucrèce versus Tarquin (dit le magnifique), roi de Rome et violeur en série de son état : il a chûté et avec lui la royauté. Ca fait loin tout de même.

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